Quand l'expert part, le savoir s'évapore : la fuite de compétences en QHSE

Entre départs à la retraite, mobilités internes ou démissions, les entreprises voient trop souvent s’évanouir un capital précieux : le savoir non documenté de leurs experts QHSE. Ce phénomène insidieux, appelé fuite de compétences en QHSE, menace la continuité, la qualité et parfois même la conformité des processus. Trop peu anticipé, ce risque mérite une réponse structurée.

Le risque caché : une compétence critique qui quitte l'entreprise sans bruit

Dans les PME industrielles ou de services, les experts QHSE (Qualité, Hygiène, Sécurité, Environnement) jouent un rôle névralgique. Ce sont souvent eux qui ont une connaissance fine des processus, des risques, des normes réglementaires, et de leur application quotidienne sur le terrain.

Or, lorsqu’un référent sécurité ou qualité part — en retraite ou pour un autre poste — son départ n’annonce pas seulement une vacance de fonction. Il peut aussi signifier la perte définitive d’un savoir métier construit sur des années. Un savoir qui n’est parfois ni écrit, ni formalisé, ni partagé.

Le vrai danger ? Ne pas avoir conscience de cette dépendance à un « homme-clé ». Tandis que l’opérationnel continue tant bien que mal, les signaux faibles — erreurs, écarts, incidents non anticipés — viennent, plus tard, révéler l’ampleur de la compétence évaporée.

Pourquoi les savoirs informels en QHSE ne survivent pas aux départs

Un grand nombre de connaissances essentielles en QHSE sont dites tacites : elles résident dans la tête des personnes. Il s’agit de gestes métiers, d’interprétations de normes, d’astuces de contrôle, de retours d’expérience face aux non-conformités, ou encore de relations clés avec des auditeurs ou partenaires extérieurs.

Ces savoirs sont rarement consignés. Pourquoi ? Par manque de temps, de méthode ou tout simplement de conscience de leur importance stratégique. Dans beaucoup d’organisations, le QHSE repose sur des compétences personnalisées, non codifiées.

Le problème se complique quand l’expert QHSE lui-même ne se rend pas compte de tout ce qu’il sait… jusqu'au jour de son départ. Son remplaçant, aussi expérimenté soit-il, se retrouve alors face à un mur : absence de procédures concrètes, manque de référentiels internes, documentation obsolète ou incomplète.

À cela s’ajoute un facteur humain : la transmission est souvent perçue comme une tâche secondaire. Pourtant, dans les domaines QHSE où la rigueur est cruciale, sa négligence peut entraîner des ralentissements, des erreurs voire des sanctions réglementaires.

Mettre en place des mécanismes de transmission avant qu’il ne soit trop tard

Anticiper la fuite de compétences en QHSE suppose de mettre en œuvre une stratégie de gestion des connaissances adaptée à la taille et aux moyens de l’entreprise.

Voici quelques bonnes pratiques concrètes pour limiter les pertes :

• Cartographier les compétences critiques : Identifiez les ressources QHSE dont l’expertise est clé pour les opérations, les audits, ou la conformité réglementaire.
• Encourager la documentation vivante : Mettez en place des outils simples, collaboratifs et accessibles pour rédiger des procédures, checklists, et retours d’expérience. L’idéal est de le faire au fil de l’eau, pas seulement en phase de départ.
• Créer des binômes ou mentorats : En associant l’expert à un collaborateur plus junior, on favorise la transmission informelle, plus efficace que n’importe quel rapport.
• Prévoir un temps de passation formalisé : Un départ se prépare. Trois à six mois avant le départ prévu, définissez un plan de passation avec les sujets à couvrir et les supports à créer ou réviser.
• Investir dans une solution de gestion des connaissances : Des outils numériques peuvent centraliser les informations métiers, les procédures et retours d’expérience, associés à une veille réglementaire et un espace collaboratif.

Enfin, il peut être utile de créer une « culture QHSE » qui valorise le partage des savoirs, à travers des rituels simples : réunions de service dédiées aux bonnes pratiques, présentations croisées entre pôles, ou encore revues post-audit.

Plus largement, éviter la fuite de compétences en QHSE est un levier de performance durable. C’est un enjeu RH, organisationnel, et stratégique qui dépasse le simple cadre technique. En traitant le sujet à temps, l'entreprise se prémunit des interruptions critiques, renforce sa conformité, et consolide ses savoir-faire.

Et surtout, elle ne dépend plus d’un seul individu « indispensable »…

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